INDIE GAMES : Une histoire du jeu vidéo indépendant - Par Bounthavy Suvilay

Publié le par VORTEX

INDIE GAMES : Une histoire du jeu vidéo indépendant - Par Bounthavy Suvilay

L’univers des jeux indépendant possède une histoire très récente ; cependant, qu’appelle-t-on réellement un jeu indépendant ? Quelle en serait une bonne définition ?

C’est la question à laquelle Bounthavy Suvilay, Doctorante en Littérature générale et comparée et Agrégée de Lettres modernes, tente de répondre dans ce livre. Je ne vous résumerai pas le livre mais tenterai de vous en donner un avant-goût… 

UN ESSAI SUR LE JEU VIDÉO 

INDÉPENDANT ?

D’après mon Petit Larousse 1996, un ‘essai’ est « un ouvrage en prose regroupant des réflexions diverses, ou traitant un sujet sans l’épuiser » (en littérature). Nous sommes tout à fait dans cette définition car cet ouvrage nous propose un ensemble de réflexions étayées par des exemples d’écrits et/ou témoignages autour d’une question centrale : Qu’est-ce qu’un jeu vidéo indépendant ?

« Certains y voient des jeux arty destinés à un publique de hipsters, tandis que d’autres les considèrent comme des titres pour masochistes n’hésitant pas à s’infliger cinquante fois le même niveau et à apprendre par cœur les mouvements des ennemis » (Bounthavy Suvilay, Indie Games, Bragelonne, Introduction, p.4)

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En 1918, David Lloyd George, alors Premier Ministre Britannique utilise la société UBM (renommée United Business Media en 2000) afin d’acheter des quotidiens et diffuer ses idées politiques. Plus tard, la même entreprise étendra ses branches dans des domaines divers tels que le jeu vidéo, la cybersécurité ou la pharmacie. En 1998, l’entreprise produit ‘l’Independant Game Festival’ dont les lauréats bénéficient d’une couverture médiatique importante auprès de la presse et des développeurs.

Une définition de ce qui se cache derrière l’étiquette jeu ‘indé’ est esquissée afin de replacer le contexte historique de ce qu’était le jeu vidéo indépendant à ses débuts :

« Œuvre réalisée par un seul concepteur ou une équipe restreinte de personnes » (Bounthavy Suvilay, Indie Games, Bragelonne, Introduction, Chap.1, p.7)

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En effet, aux balbutiements de la chronologie des jeux vidéo, un nombre important de titres étaient réalisés par une seule et même personne à ses heures perdues :

1980 : Roberta Williams sur Apple II conçoit "Mystery House” avec lequel elle connaîtra un succès commercial et fondra ‘Sierra On-Line’ ; société spécialisée dans le genre ‘aventure’. Elle sera également à l’origine de l’aventure "Kings Quest"

1984 : Jordan Mechner avec ‘Karatéka’

1989 : Jordan Mechner, encore, avec ‘Prince of Persia’

1981 : Richard Garriott a développé ‘Ultima’, le premier d’une série avec monde ouvert, puis en 1997 ‘Ultima Online’, l’un des tout premiers MMORPG

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Des années 1970 à 1990, la création de jeux vidéo était un loisir pour ces amateurs passionnés d’informatique et ont, de fait, contribués au développement de genres vidéo-ludiques toujours pérennes aujourd’hui. A mesure que la technologie évoluait, les personnes seules ont laissé place à des équipes de plus en plus grosses et l’on a assisté à une professionnalisation massive de ce secteur émergeant. Le son et l’image demandaient des traitements de plus en plus élaborés requérant alors des personnes aux compétences fortement spécialisées.

2008 : UNE ANNÉE

CHARNIÈRE mais aussi des

bas… 

En 2008, Jonathan Blow crée la surprise avec la production de BRAID. Le titre est alors développé par un seul créateur, un illustrateur et des musiciens. Ave plus de 6 millions de Dollars de chiffre d’affaire en 2015, « la conception de jeu-vidéo ne paraissait plus comme un rêve inaccessible » (Bounthavy Suvilay, Indie Games, Bragelonne, Chap.1, p.12).

La même année, ‘Castle Crasher du Studio de développement indépendant Behemoth dépasse le million d’exemplaires vendus sur le Microsoft Store. [(Dire que j’ai interviewé son 'Chief Executive Officer'John Baez : Ici )]

Un autre titre phare a été créé par un seul homme : Markus Persson (alias ‘Notch’). Tout d’abord développeur chez ‘King’ (Candy Crush) avant de démissionner et consacrer tout son temp à Minecraft : 101 millions de chiffre d’affaire en 2012, revendu 2,5 milliards de dollars à Microsoft en 2014.

Or, l’argent ne fait pas nécessairement le bonheur. Plus loin dans son ouvrage, Bounthavy Suvilay nous donne quelques exemples de dépressions post-réussite, des plus étonnantes… Elle relate notamment le cas de Phil Fish avec ‘FEZ’, devenu « ennemi numéro un des gamer » après avoir « taxé de racisme » durant un salon professionnel ou de Zoë Quinn qui s’est vue reprochée d’avoir profité d’un publicité facile après la mort de Robin Williams car son jeu traitait de la dépression ou même d’avoir bénéficié d’une ‘promotion canapé’((Bounthavy Suvilay, Indie Games, Bragelonne, Chap.1, p.20).

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Plus le temps passe et plus il y a de jeux créés. La plupart voient le jour principalement sur ‘Steam’ : « plateforme de distribution de contenu en ligne, de gestion des droits et de communication développée par Valve et disponible depuis le 12 septembre 2003 […] orientée autour des jeux vidéo » (source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Steam )

En 2011, 285 nouveaux jeux en moyenne sont mis en ligne par mois. En 2015, ce chiffre passe à 3 132. Par conséquent, plus il y a de jeux et moins il y a de visibilité pour les petits créateurs, ce qui peut paraître paradoxal de prime abord mais logique, car les contenus deviennent de plus en plus vastes.

Parallèlement à cela, les plateformes comme Steam ou AppleStore prennent 30% du chiffre d’affaire réalisé sur les ventes. D’autres éditeurs prennent en moyenne 18 à 20% ; s’ajoute à cela des achats fait par les joueurs au moment des soldes et l’on constate, sur la durée, qu’il devient difficile pour de petits développeurs de sortir du lot. Les créateurs essaient donc de faire prendre d’autres directions à leurs jeux :

« On a besoin de titres intelligents qui font réfléchir et touchent les gens » (Jenova Chen in IG Magazine, 2009, cité par Bounthavy Suvilay, Indie Games, Bragelonne, Chap.1, p.23). C’est ce que l’on trouve dans ‘What remains of Edith Finch ?’ (2017) notamment dans sa narration : une proposition plus réfléchie qui vise à raconter une histoire … 

Conclusion : Les plateformes de diffusion s’étant multipliées sur le marché du jeu vidéo, cela a entrainé d’une part, un gros flou concernant le succès commercial des jeux indépendant mais d’autre part, une diversification abondante dans les domaines de la création.

INDIE GAMES : Une histoire du jeu vidéo indépendant - Par Bounthavy Suvilay
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DES PROFILS DE CRÉATEURS

DIVERS ET

BEAUCOUP D’IMPRÉVUS

Le livre nous dresse plus tard le profil de créateurs de jeux ainsi que leur histoire professionnelle : En effet, il est parfois difficile de travailler ensemble ne serait-ce que sur un plan purement logistique et organisationnel. Bounthavy Suvilay nous présente à titre d’exemple le cas du Studio ‘Spry Fox’ (Twitter : Spry Fox) où 17 personnes travaillent à leurs domiciles respectifs sur des fuseaux horaires différents. Ils utilisent des logiciels comme Slack ou Trello pour organiser leur équipe.

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Elle passe aussi en revue des problèmes de choix techniques (‘unités non carrées ou rectangulaires’ ; p.56) qui engendrent des retards de production. Les impondérables, ce sont aussi des soucis administratifs dû à des changements d’éditeurs sur les musiques employées (c.f. ‘What remains of Edith Finch ?' ; p.60). Il y a aussi des histoires de locaux qui ne se prêtent pas à être un espace de travail satisfaisant : Toronto ; DrinkBox studio (Twitter : DrinkBoxStudios) ; « la température montait jusqu’à 39° en été et descendait à -31° en hiver » (p.61). Pour finir, elle dépeint aussi des histoires de dettes, des problèmes de cession de copyrights, d’insolvabilité et procès divers et variés…

Pour couronner le tout, après avoir survécu à l’élaboration d’un premier jeu, cela se passe un peu comme les gagnants de télé crochets type ‘Star Acc’ ou ‘The Voice’ ; la promesse de gain n’est qu’une avance sur le chiffre d’affaire finalement généré. A propos de ‘Shadowgrounds’ le studio Frozenbite s'exprimait : « … la plupart de nos contrats avaient une clause de ‘garantie minimale’ qui nous n’avons pas atteinte et nous n’avons jamais touché de royalties » (p.64).

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Conclusion : L’élaboration d’un jeu se joue aussi sur un plan humain. Il faut donc une bonne coopération et organisation pour mener ses projets à terme, puis, compter sur un bon 'facteur chance' … 

BILAN

Un ouvrage bien garni, riche d’anecdotes et d’illustrations ! Bounthavy Suvilay dresse un véritable essai sur la définition de ce qu’est un ‘jeu vidéo indépendant’ en y développant tous les aspects : historique, expérimentaux, artistiques, financiers et surtout humains. J’ai aimé parcourir ce livre car j’y ai appris tellement de choses sur l'ensemble des domaines que recouvre l'étiquette du ‘jeu indépendant’ ! Foncez, c’est une lecture vraiment intéressante qui montre que le succès commercial d’une œuvre vidéoludique est quasiment impossible à prévoir !!

 

UN EXCELLENT livre !

Parce que sa lecture est enrichissante

Parce qu’il est bien illustré

Parce que pour 35 €, on en a pour sa culture vidéo-ludique

 

 

 

 

Publié dans Editions spéciales

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